A bon entendeur, M. Erdogan!
Zaman (Turquie) 7 Octobre 2012 traduit de l'anglais par Djazaïri
Des
manifestants se sont affrontés à la police dimanche alors d’environ
155 000 manifestants étaient rassemblés place Sıhhiye à Ankara ce
dimanche, dans une manifestation organisée par la Fédération Alevi
Bektaşi et le Fédération des Associations Alévis pour exprimer leur
demande d’égalité.
La police a
tiré du gaz lacrymogène sur certains manifestants parce qu’ils avaient
refusé d’être fouillés à leur arrivée sur la place Sıhhiye. Il y a eu un
bref affrontement entre manifestants et policiers quand la foule a
commencé à pousser après la barricade de la police à l’entrée. L’agence
de presse Cihan a rapporté que ceux qui se sont heurtés à la police aux
checkpoints de l’entrée appartenaient à la Plateforme Socialiste des
Opprimés (ESP) et à une organisation marginale nommée Partisan. Cihan
indique que ce sont ces organisations qui ont lancé des objets contre la
police. Un manifestant a été arrêté et trois agents de police ont été
blessés dans ces incidents.
Le
rassemblement, appelé le "Laik ve Türkiye Demokratik ICIN ESIT
Yurttaşlık Mitingi" (manifestation de l’égalité citoyenne pour une
Turquie laïque et démocratique), a commencé dans la matinée, les
manifestants alévis s’étant regroupés à la gare d'Ankara avant de se
diriger sur Sihhiye vers 10:30. Les manifestants ont scandé des slogans
appelant à la justice pour le massacre de Sivas en 1993 où 35 alévis
avaient été tués, à l'abolition des cours de religion obligatoires, à
l’octroi aux lieux de culte des Alévis (cemevi, mot dérivé de l’arabe
djemaa) le même statut que les mosquées, tout en protestant contre
l’éventualité d’une guerre avec la Syrie et en exprimant un soutien au
peuple syrien.
Outre l’ESP et
Partisan, la manifestation a vu la participation d’autres organisations
associatives et politiques, dont le Parti de la Solidarité et de la
Liberté (ÖDP), le Parti Communiste Turc (TKP), l’Association Halkevleri,
le Parti Populaire de Libération (HKP) et beaucoup d’autres.
Ces
organisations protestaient aussi contre les insuffisances de l’enquête
sur des incidents récents où les maisons d’habitants Alévis avaient été
marquées en rouge dans plusieurs villes.
Un bus du Parti
Républicain Populaire (CHP) ouvrait la marche pour la foule dans sa
marche entre la gare de chemin de fer et Sıhhiye. Le fan club Çarşı de
l’équipe de football de Beşiktaş jouait du tambourin et il y avait un
groupe de caisses claires nommé Kızıldavul (tambour rouge).
En 2010, le
gouvernement avait organisé sept ateliers sur une période de six mois
qui avaient vu la participation de 400 universitaires, théologiens,
membres d’organisations de la société civile, politiciens, journalistes
et représentants Alévis et Bektaşis.
Malgré tout, un
certain nombre d’organisations avaient protesté contre le gouvernement,
accusant les autorités de «sunniser» les Alévis dans le pays.
Toute la
lumière n’a pas encore été faite sur l’histoire des Alévis au temps de
l’empire ottoman, mais les relations entre les communautés sunnite et
alévie en Anatolie ont été difficiles dès le début. En 1511, l’armée
ottomane avait brutalement réprimé en Anatolie une révolte des Turkmènes
Kizilbaş (tête rouge) de confession alévie, et 40 000 d’entre eux
avaient péri. La bataille de Çaldıran, entre l’empire Ottoman sous Yavuz
Sultan Selim et le dirigeant Séfévide Ismaïl en 1514 avait eu pour
conséquence un édit impérial ordonnant la mise à mort de tous les
Kızılbaş de la région.
Les siècles qui
suivirent furent aussi troublés, mais pas aussi brutaux. En fait, les
troupes impériales ottomanes – appelées janissaires – étaient recrutées
exclusivement dans des loges Bektaşi. Ce qui reste difficile à
apprécier, c’est l’étendue de la persécution des Alévis à l’époque
républicaine. Des centaines d’Alévis furent tués dans des pogroms, dont
beaucoup considèrent qu’ils avaient été ourdi en sous-main par des
organisations secrètes à l’intérieur de l’appareil d’Etat, dans les
villes de Çorum, Yozgat et Kahramanmaraş, dans les années 1970. 34
artistes Alévis avaient péri brûlés vifs en 1992 dans l’incendie de
l’hôtel Madimak à Sivas. Il y a eu d’autres incidents, comme celui dans
le quartier alévi de Gazi à Istanbul en 1995, quand des Alévis avaient
été la cible de tirs à l’arme automatique.
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